titre:La Vie d'extinction en extinction
auteur:J. SINTES
date:00-00-0000
Ce document sur l'extinction des espèces est présenté en deux volets :
-I- Le thème de cette réunion du Bar des Sciences
-II- Les notes prises ce soir là par Gisèle CELIE (T&V de Montpellier)
- Premier Volet : LA VIE … d’EXTINCTION … en EXTINCTION !!!
La lutte pour la vie ne semble pas être un vain mot. Depuis ses origines la vie évolue, se déploie crée de la biodiversité. Mais le cours de la vie n’est pas un long fleuve tranquille. De grandes extinctions ont déjà frappé à cinq reprises, éliminant jusqu’à 95 % des espèces !
Des causes terrestres – volcanisme, glaciations, tectonique des plaques, perturbation des courants marins et célestes – météorites – ont rendu la vie difficile à la Vie.
Pour autant, on constate que l’arbre du vivant s’ouvre en un éventail de lignées aux caractéristiques différentes avec l’émergence, malgré tout, de groupes aux plans d’organisations complexes comme les vertébrés et, parmi eux, les oiseaux et les singes. On note aussi que les plus anciennes formes de vie en terme de structures, comme les bactéries, se portent encore fort bien. Comment concilier l’ouverture de l’éventail du vivant avec ces grandes extinctions, même si de grandes lignées ont bel et bien disparu ?
La question des grandes extinctions ou des catastrophes émerge dès les débuts de la paléontologie, il y a deux siècles. Il y a toujours eu de vives controverses entre évolution de la vie ou pas ; entre l’importance des catastrophes ou pas … et sur la cause de ces catastrophes. Est-ce que l’occurrence de grandes extinctions est bien avérée ou s’agit-il d’interprétations biaisées par l’état des vestiges disponibles ; par le nombre de chercheurs intéressés par ces questions ou encore de la projection dans des mondes perdus de nouveaux rapports aux mondes propres à nos sociétés et à leur histoire ?
Une seule certitude : la sixième extinction est en cours ; sa cause est interne à la vie et c’est … l’homme !
BAR DES SCIENCES – Paris-Ile-De-France ;
Réunion du mercredi 7 avril 2004.
Invités :
Jean BROUTIN – Professeur à Paris 6 UPMC, spécialiste des flores anciennes
Daniel GOUGET – Professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle, spécialiste des premiers vertébrés (MNHM)
Yves GIRAULT – Professeur au MNHN, spécialiste de biodiversité
Patrick DE WEVER – Professeur au MNHN, spécialiste des invertébrés
Les débats étaient animés par Isabelle Huau et Pascal Picq.
Mél. : contact@bardessciences.net
WEB : www.bardessciences.net
Deuxième Volet : Notes de Gisèle CELIE.
Nous n'avons des traces d'extinction qu'à partir du moment où il y a eu des organismes avec des parties dures pouvant générer des fossiles, soit 600 millions d'années. Donc, ce soir, nous ne pourrons pas remonter plus loin.
La vie a émergé des eaux, il y a 400/500 millions d'années. Les microorganismes ont secrété de l'oxygène O² (devenu ensuite O3) qu'ils ont rejeté dans l'atmosphère. Ce gaz était mortel pour eux, quand la concentration en a été trop élevée, il y a dû avoir une extinction au profit d'organismes - aimant l'oxygène - qui s'étaient développés entre temps.
Biodiversité : terme flou. D'abord, elle est estimée sur la base des comptages actuels. Bien qu’incertains, ils oscillent entre 3 et 100M° d'espèces! Chaque nouvelle espèce doit être déclarée lors de sa découverte, mais il y a beaucoup de synonymies. De ce fait, le nombre d'espèces peut être scientifiquement ramené entre 5 et 15 M°; en Europe le chiffre officiel est de 138 000 espèces.
La plus grande biodiversité est dans les forêts tropicales. Comment y effectue-t-on les comptages actuellement : on pratique des fumigations sur des zones limitées ; les bestioles tombent, on les compte, puis on extrapole à l'ensemble de la zone (alors que pas une forêt n'est semblable à une autre). L'imprécision est naturellement encore bien plus grande pour les fossiles.
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Extinction? Mais par rapport à quoi ? Ne pas oublier que certaines espèces se sont éteintes d'elles-mêmes. On parle d'effet Lazare quand une espèce disparaît puis réapparaît. Les grands singes et les hommes ont perdu beaucoup de leur biodiversité mais les hommes prolifèrent et il n'y aura plus d'orangs-outangs dans 50 ans. Compter le nombre d'individus restants n'a pas la même signification selon les espèces ; il faut prendre en compte les modes de reproduction (plusieurs petits ou un seul) et la durée de l'élevage (longue ou pas).
Une extinction générale met 1M° d'années pour se produire, la récupération va durer entre 5 et 10M°.
Les inversions du champ magnétique terrestre peuvent-elles générer des extinctions générales ? Apparemment pas, sauf si à un moment la magnétosphère disparaît complètement. Alors plus de protection contre les rayons cosmiques et bonjour les cancers, etc.
Les organismes les plus complexes sont-ils plus sensibles à une extinction que les plus simples ou les plus primitifs ?
Réponse assez vague. Les organismes spécialisés semblent plus sensibles aux radiations.
P. Pic : attention, les organismes primitifs n'étaient pas forcément plus simples que les modernes. En fait, ce sont les fonctions qui se sont diversifiées et complexifiées avec l'évolution.
Y a-t-il des périodes où la vie a été plus inventive ? Oui, par exemple quand les angiospermes ont inventé le fruit. Ils ont pu ensuite envahir la planète.
L'étude de végétaux possibles peut aussi donner des indications sur les extinctions ; par exemple, jusqu'à la fin du Permien, on trouve des spores et des grains de pollen fossiles qui disparaissent au profit des champignons, végétaux charognards prospérant sur les débris organiques (il y a eu destruction). Pendant 5 ou 6M° d'années la végétation reste très pauvre, puis elle revient et apparaissent les conifères.
La vie n'est-elle apparue qu'une fois ? On ne se pose jamais cette question (influence évidente des religions qui ont besoin d'un Dieu créateur tout puissant). Découlant de phénomènes physico-chimiques, elle devait nécessairement advenir, mais si les conditions étaient à nouveau réunies pourquoi pas plusieurs fois ?
Les équilibres ponctués ? La succession est la suivante : un intervalle de forme stable, un petit changement, un intervalle de forme stable, un petit changement, etc.
C'est peut-être dû à la manière dont nous recueillons nos informations : une information est toujours exceptionnelle par rapport à l'ensemble. Les équilibres ponctués, c'est le modèle de Gould (*), il y en a un autre : le gradualisme.
Pourquoi s'occuper des espèces menacées ? Un peu par solidarité entre êtres vivants, aussi pour le plaisir de voir l'état primitif de la nature et le montrer dans les parcs nationaux par exemple.
On ne s'est pas beaucoup préoccupé de la menace d'extinction, pourtant réelle, que font peser les activités humaines sur l'ensemble de la planète. Enfin, espoir : l'homme est le seul être vivant à avoir conscience de l’influence néfaste qu’il exerce sur la nature.
Tableau des cinq grandes extinctions :
1) Ere primaire : - ordovicien, extinction 96% de la vie disparaît 435M°
2) - dévonien, les coraux disparaissent 360M°
3) Limite ère primaire- (permien) et secondaire (trias) 250M°
4) Ere secondaire - fin du trias 205M°
5) Limite ère secondaire (crétacé) et ère tertiaire fin des dinosaures 65M°
(*)GOULD Stephen, Paléontologue américain (New-york).
Il est l'auteur, avec l'américain Niles ELDREDGE, d'une théorie selon laquelle l'évolution des espèces serait une suite de périodes de stabilité, entrecoupées de spéciations brutales (par opposition au modèle graduel du néodarwinisme).
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