L’ISLANDE SE CHAUFFE AU MAGMA
La science bénéficie parfois de sacrés coups de pouce du destin. Cette fois, ce sont des géologues islandais menés par l’américain Wilfred Elders qui ont tiré le gros lot.
Au printemps 2009, lors d’un forage d’étude réalisé par le consortium Iceland Deep Drilling Project, dans le champ géothermique de Krafla, au nord-est de l’Islande, ils ont atteint accidentellement une poche de magma !
Un indicent rarissime (un seul exemple connu, en 2005 à Hawaï), qui leur a permis de publier leurs analyses dans la revue Geology de Mars.
Il y a deux ans donc, les géologues exploraient la caldeira du volcan Krafla afin d’évaluer son potentiel géothermique.
Cette région est en effet connue pour abriter dans ses profondeurs de l’eau ans un état supercritique : soumise à une pression supérieure à 22 mégapascals (Mpa) et à une température de plus de 374° Celsius, elle prend une forme nouvelle, ni liquide ni gazeuse, qui pourrait offrir une énergie thermique jusqu’à dix fois celle d’un puits géothermique islandais classique.
Un forage de 4,5 kilomètres était donc prévu pour étudier cette ressource de l’avenir.
Parvenus à -2104 mètres, les ennuis se sont multipliés et le trépan s’est arrêté : le forage avait percé une poche de magma à 900 °C qui avait empli sur neuf mètres le fond du puits ! Plus étonnant : alors que la zone de forage est située dans une couche basaltique, l’analyse du magma a montré qu’il était riche en silice, ce qui donne, une fois refroidie, de la rhyolite visqueuse.
Une roche dont l’origine était discutée.
L’analyse des isotopes d’hydrogène et d’oxygène du magma de Krafla indique que la rhyolite est formée par la fonte partielle, dans le manteau, de basaltes altérés par des processus hydrothermaux.
Mieux ! selon les chercheurs, ces poches de magma proches de la surface pourraient devenir de nouvelles sources d’énergie très prometteuses.
Converti en puits géothermique, le forage de Krafla produit de la vapeur à 400°C apte à fournir une puissance de 25 mégawatts : assez pour chauffer quelque 25 000 à 30 000 foyers ….
Les chercheurs s’apprêtent à repartir à la chasse à l’eau supercritique en 2013.
Sylvie ROUAT - Sciences et Avenir – Avril 2011.